Assez parlé d'amour d'Hervé LE TELLIER

Publié le par LES PASSIONS DE LAURA

ASSEZ PARLE D AMOURJc Lattès – 279 pages - 4è de couverture :

''La planète connut cette année-là son automne le plus chaud depuis cinq siècles. Mais de la clémence providentielle du climat qui joua peut-être son rôle, il ne sera plus question. Ce récit couvre l'espace de trois mois et même un peu plus. Que celle - ou celui - qui ne veut pas - ou plus - entendre parler d'amour repose ce livre.'' Ainsi commence le roman.

 Anna et Louise pourraient être soeurs, mais ne se connaissent pas. Elles sont mariées, mères, heureuses. Presque le même jour, Anna la psychiatre va croiser la route de Yves, l'écrivain, Louise l'avocate croise celle de l'analyste d'Anna, Thomas. A quarante ans, à ce tournant d'une vie qui ne comporte pourtant que cela, la foudre est encore permise, mais quand on a cru - à tort - que le destin était à jamais écrit, le désir et la liberté se payent cher et comptant.
En  horloger délicat, l’auteur trace la parabole de leurs trajectoires. Amoureux de ses personnages, il dessine une galerie de portraits tendres et sans pitié de femmes, d'amants et de maris
.

L’auteur :

Hervé LE TELLIER est docteur en linguistique, auteur d’un essai sur l’esthétique, enseigne également le journalisme à Paris III et les pratiques rédactionnelles à Paris V.  Il est membre de l’Oulipo  et l’un des Papous de France Culture le dimanche entre 12h45 et 14h.

Mon avis :

Un régal !! UN REGAL !! (de la part d’une gourmande comme moi, ça vaut son pesant d’or…)

LE livre de la rentrée littéraire 2009 mais lui, on n’en a pas parlé ou trop peu, hélas.

Des pages (trop peu : 279) de bonheur et d’amour, malgré le titre - beaucoup de petits chapitres très courts mettant en scène un ou deux des personnages qui se croisent et tricotent leurs destinées. Tous sont intelligents, cultivés : on y parle de Barthes, Piero della Francesca, Chostakovitch, Lacan, Eric Rohmer, Virginia Woolf...

Les deux femmes Anna et Louise sont les plaques tournantes de l’histoire et autour d’elles en un ballet subtil, quatre hommes. Tout le monde va tomber à un moment ou à un autre dans la tourmente de l’amour (présent - passé ou perdu). C’est fin ! C’est léger ! Il y a des scènes que j’adore (par exemple quand Anna se choisit des vêtements « en solde » dans un magasin « mi-galerie d’art, mi-salon » où les vêtements ne sont qu’en un exemplaire , sous l’œil ahuri d’Yves, l’écrivain-amant qui les trouve hors de prix- quand elle invite un ancien amant à venir loger dans la chambre d’ami si un jour il a une galère ce qui va advenir et….je ne vous dis pas la suite… - quand elle ne sait pas si d’un mari-paquebot elle doit passer à un amant-ketch….).

Il y a de la sensibilité là-dedans : le cadeau d'Yves à Anna pour ses 40 ans, les réflexions sur le sens de la vie  (quand on a atteint ou dépassé la quarantaine, ça sonne juste), sur la fidélité , sur la routine, sur les sentiments…..
Il y a aussi de l'humour ; ainsi quand le psy dit à la femme qu'il aime et qui se prétend folle : "Je veux bien d'une folle ; j'ai toujours rêvé de rapporter du travail à la maison."

Voici le genre de phrases que j'ai aimées : "Tu es si présente en moi que ton absence est presque insensible. C'est ton empreinte sur mon sable, la mélodie silencieuse que ton existence laisse en moi." et "Il y a dans nos gestes plus de naturel que de provocation, plus d'étonnement que de perversité. Tout ton corps sourit au mien, joyeusement." et encore "Tu t'emplis de ce silence où nous sommes encore ensemble, en prévision d'un plus long à venir, où nous ne le serons plus" De purs petits bijoux ! 

En bon Oulipien, Hervé Le Tellier s’est donné des contraintes pour l’écriture ; on retrouve les listes, les numéros….et la structure narrative du roman fait appel à la règle des dominos abkhazes. (« Dans la règle des dominos abkhazes, fait rare, il est possible de reprendre un domino déjà posé. Dans ce roman-ci, un double posé donnera naissance à un chapitre à un seul personnage, un simple à un chapitre à deux personnages, exceptionnellement trois si l'un des personnages n'agit ni ne parle. Le double zéro est un cas intéressant : il créera un chapitre avec deux personnages secondaires, ou un seul ».)

Mais pas de panique ! si l’on n’est pas critique littéraire et/ou spécialiste de la littérature oulipienne, on peut apprécier, que dis-je, on doit apprécier ce petit roman à sa juste valeur : un GRAND moment de bonheur.

Publié dans LIRE

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